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Histoire

Le Pérou, des origines précolombiennes à l’hispaniste, de l’indépendance au réveil amérindien


Le Pérou apparaît très tôt comme un foyer historique majeur, l’un des espaces géographiques privilégiés où se formèrent certaines des « cultures premières » qui furent à l’origine des grandes civilisations précolombiennes. Chavin, Moche, Tiahuanaco, Huari ou Chimu, autant de noms qui ponctuent, au fil des siècles, la continuité culturelle qui s’affirme depuis les hautes terres andines jusqu’aux « oasis » répartis tout au long des déserts littoraux de la côte pacifique. Témoins d’une antiquité très lointaine, ces sites sont loin d’avoir livré tous leurs secrets et il ne fait guère de doute que la recherche archéologique permettra de mieux éclairer dans l’avenir les siècles obscurs du passé péruvien. La période correspondant à la domination des Incas est, en revanche, beaucoup mieux connue. L’empire dit « des Quatre Quartiers » (Tahuantinsuyu) – beaucoup plus étendu que le Pérou actuel, dans la mesure où il débordait très largement sur l'Equateur, la Colombie, la Bolivie et le Chili d'aujourd'hui – marque à la fois l’apogée culturel du Pérou précolombien en même temps que le moment de son effondrement sous les coups des conquérants espagnols. Les souverains incas avaient pourtant imposé leur autorité depuis l’Equateur jusqu’au nord du Chili actuels et leur empire englobait la Bolivie ainsi qu’une partie du territoire colombien. Ils avaient édifié des villes et des monuments grandioses et nous ont laissé, outre les murailles de Cuzco, les ruines imposantes de Machu Picchu, de Vilcabamba ou de Choqek’iraw (« le berceau de l’or » en langue quechua), cités de pierre impressionnantes accrochées aux pentes de montagnes vertigineuses, longtemps dissimulées par la jungle qui les recouvrait. Puissant et rigoureusement organisé, cet empire ne peut cependant résister à l’irruption d’une poignée de conquérants déterminés, bien décidés à renouveler au Pérou l’opération qui avait permis à Cortés et à ses compagnons de s'emparer, quelques années auparavant, des trésors de Tenochtitlan-Mexico. Arborant la bannière de Santiago –
le Saint-Jacques de la Reconquête ibérique, dont le seul nom était devenu leur cri de guerre – les soldats de Pizarro et d’Almagro ne firent qu’une bouchée – chevaux et armes à feu aidant – de la résistance inca, malgré un rapport de forces en effectifs qui leur paraissait plus que défavorable. Un peu plus d’une centaine d’Espagnols conduits par des chefs capables et audacieux purent ainsi s’emparer d’un empire étendu sur des centaines de milliers de kilomètres carré et peuplé de millions d’habitants. La vaine recherche d’un nouveau royaume de l’or, les difficultés rencontrées au Chili et les querelles sanglantes qui opposèrent entre eux les conquérants parurent menacer un temps la pérennité de la mainmise espagnole sur la région, mais les envoyés du roi Philippe II surent rétablir la situation, et la vice-royauté de Lima se substitua bientôt à l’Empire inca. L’exploitation des mines d’argent du Potosi et la fortune des villes coloniales firent rapidement du Pérou un nouveau monde où tout semblait possible à tous ceux qui quittèrent alors Cadix pour faire voile vers les Indes occidentales. C’est l’époque au cours de laquelle, dans son Mémorial publié en 1630, le franciscain Buenaventura de Salinas y Cordoba compara Lima, la nouvelle capitale du pays, établie à proximité de la côte du Pacifique, aux plus belles villes d’Europe : à Rome pour ses sanctuaires, à Gênes pour l’intelligence de ses habitants, à Venise pour ses richesses, à Florence pour la douceur de son climat et à Salamanque pour son université… Ce « siècle d’or » ne dura pas. Les mines qui faisaient la fortune du Pérou s’épuisèrent, les révoltes indiennes se firent fréquentes et les Créoles, descendants des premiers colons, ne voulurent plus endurer l’autorité des fonctionnaires royaux envoyés de métropole. Au début du XIXe siècle, la diffusion de l’esprit des Lumières dans l’Amérique ibérique et l’exemple donné par la jeune république des Etats-Unis formée au nord du continent, entraînèrent naturellement la révolte contre le souverain de Madrid, favorisée par l’usurpation de Joseph Bonaparte. Une fois passé le temps des libertadores, les Etats nés de l’effondrement de l’Empire espagnol se retrouvèrent cependant confrontés à une instabilité politique chronique, propice aux coups d’Etat militaires. Le caractère oligarchique du pouvoir, la persistance de grandes inégalités sociales et le statut de dominés qui demeurait celui des Indiens condamnaient fatalement tout effort de modernisation. Pouvoirs militaires, sous-développement structurel et maintien de l’influence nord-américaine furent ainsi le lot du Pérou durant la majeure partie du XXe siècle, alors que le pays se transformait profondément sous l’effet de l’explosion démographique et d’une urbanisation aussi massive qu’incontrôlée. Autant de défis difficiles à relever pour le président Alan Garcia, élu en 2006 à la tête du pays…

Date de dernière mise à jour : 02/07/2021